Penderie Chambre

Cette réalisation est un peu plus complexe que celles présentées dans les pages précédentes, puisqu'elle inclue la fabrication de portes à cadres. On arrive là dans le noble art de la menuiserie, puisque nous devront combattre le démon du gauchissement.
On est encore loin du sommet de la chevalerie dans ce domaine, qui est la réalisation de chaises, puisque là les assemblages doivent être à l'épreuve des dragons-pachydermes, avec des sections de baguettes magiques...
Bon, malheureusement, je ne suis pas encore preux chevalier, je vais donc utiliser une ruse affreuse, plutôt que m'emmerder m'enduire de déjections à faire selon les règles de l'art...

L'idée de départ était d'avoir un meuble bicolore, avec les panneaux centraux des portes de la même couleur que le mur, afin d'être moins "massif" que s'il avait été intégralement en bois naturel.
 

le Gauchissement

Le gauchissement est un défaut de planéité. La perfection géométrique n'étant pas de ce monde, surtout dans le travail du bois, matière noble, vivante, douce au toucher et définitivement chiante escagassante lorsqu'on veut avoir un résultat bien ajusté. On a l'impression, en achetant du bois raboté, de partir sur des bases rigoureuses. Eh ben, que nenni!, le bois n'est jamais parfaitement sec lorsqu'il est usiné, et la différence d'humidité entre l'entrepôt et votre home-sweet-home fait que le bois se courbe et se vrille. Donc le noble menuisier stocke son bois à température pendant au moins six mois, puis dégauchit ses planches, les choisit soigneusement en ayant fait une savante lecture du sens des fibres, de la distance par rapport au coeur de l'arbre... Tout cela pour que, au fur et à mesure que chaque planche évolue, les autres évoluent d'une manière annulant le défaut de la première... On est donc loin de nos joyeux bricolages plutôt instinctifs...

Je propose donc un mode d'assemblage qui permette de faire des corrections a posteriori, par de simples calles...

Une porte, c'est un rectangle, donc quatre coins. Mais, souvenez-vous de vos cours de géométrie, un plan est défini par trois points, donc un triangle. Il ne fallait pas rêver au fond de la classe, si on vous l'a enseigné, c'est que ça sert à quelque chose...
Donc notre quatrième point a tout sauf envie de rester dans le même plan que ses trois collègues. Les deux coins situés cotés gonds seront toujours bien positionnés, mais, si la porte est bien fermée en haut, le coin bas aura tendance à être trop rentré ou trop sorti (ou vice-versa).
L'astuce est donc de considérer une des diagonale comme une charnière, c'est-à-dire effectuer en ces deux coins des assemblages qui permettent de corriger le gauchissement. Il s'agit d'assemblages à mi-bois.

 

L'assemblage à mi-bois

L'assemblage à mi-bois s'effectue en amincissant chaque tasseau sur la partie a assembler. En intercalant des petits bouts de papier kraft sous les vis gauches ou droites, on compense le vrillage. J'utilise du papier kraft, car sa couleur est proche du bois, et on peut facilement le poncer pour affleurer l'assemblage.

4 vis
Assemblage à mi-bois
dégauchissement produit par les cales

Pour amincir les tasseaux:
On effectue le traçage des parties a enlever à l'aide d'un trusquin

Pointe de traçage
Surface de référence
Règle
Coin de blocage de la règle
Le trusquin

On règle la distance entre la surface de référence et la pointe de traçage, puis on effectue les marques sur les cotés et le bout de chaque tasseau, en appliquant à chaque fois la surface de référence sur le dessus des tasseaux tels que représentés dans le schéma précédant. Donc pour le tasseau supérieur, on aura reporté l'épaisseur à garder, et pour l'autre, l'épaisseur à enlever. Il est préférable d'effectuer la marque par petites touches, en faisant que la pointe commence à chaque fois sa trace dans du bois non marqué, sinon, la pointe a tendance à être embarquée par les fibres du bois. On peut aussi donner un coup de crayon gris sur la marque, cela augmente sa visibilité lorsqu'on en arrive à enlever le bois affleurant le tracé.

Ensuite, on effectue des traits de scie perpendiculairement au tasseau (tous les 3 à 5 cm),
Marque du trusquin
Traits de scie
Sens d'attaque du ciseau
puis on fait sauter le bois au ciseau, en attaquant par le bout du fil du bois. C'est finalement très aisé et rapide, du moins si il n'y a pas de noeuds, sinon, il faut multiplier les traits de scie autour du noeud.

Un petit coup de lime électrique égalise les surfaces à assembler. Ne pas tenter de faire le coin intérieur avec cet outil, cela fera des arrondis; Redonner plutôt un coup de ciseau.
Enfin, on perce les trous dans la partie fine, et on assemble.


 

les portes

Chaque porte est composée d'un cadre constitué de tasseaux de section 33*95 mm, entourant un panneau de contreplaqué. Les avantages d'une section plutôt grosse des tasseaux sont nombreux : possibilité de visser sur l'épaisseur (une épaisseur plus faible auraient imposé le collage ou le chevillage, ce qui interdisait nos réglages de gauchissement), et possibilité de tricher en rabotant pour obtenir des jeux de fonctionnement réguliers (plus un élément est large, moins on voit les déformations en trapèze qu'apportent ces correctifs). Deux coins disposés en diagonale sont assemblés à mi-bois, les deux autres coins peuvent se contenter d'être des assemblages en bout, plus rapides à effectuer.

Assemblage vissé en bout
Position des joues provisoires de montage (l'une devant, l'autre derrière les montants)

- Attention pour les trous de vis avec lamage: lorsqu'un trou est constitué d'une succession de diamètres, la première tendance est de se dire que commencer par le petit diamètre va être plus précis et plus facile. Mais alors, lors du passage de la seconde mèche plus grosse, le foret se centre mal, et on fait des trous ovales en arrachant tout: moralité: commencer par le gros diamètre.
- Afin de ne pas faire des trous trop en biais, ce qui pourrait aboutir à ce que la vis soit pas bien centrée sur le montant vertical, je dispose une équerre à coté de la perceuse pour me servir de guide. Cela reste un peu pifométrique, mais je n'ai pas de perceuse à colonne...
- Pour bien positionner les deux pièces entre elles lors du premier assemblage, celui où les vis vont percer leur trou dans le montant vertical, je dispose de part et d'autre de la pièce déjà percée deux bouts de planches qui font joues. Elles sont tenues avec un serre-joint.
- Il est intéressant d'acheter pour sa visseuse un embout long pour pouvoir atteindre le fond du lamage. De plus, lors de l'assemblage des aménagement intérieur du placard, on se rendra compte que cet embout long est pratique pour les vis qui sont très près d'un angle, ce qui empêche d'avoir la perceuse bien en face de la vis. Avec cet embout long, c'est un peu plus dans l'axe.
- Je prends toujours des vis à agglo avec tête cruciforme. Je déteste les têtes fendues, qui par exemple sont vendue avec les gonds. Difficile de les enfoncer droit avec un tournevis à main; c'est un peu plus facile à la visseuse. Mais je dois quand même faire une amorce de trou avec un gros clou que j'enfonce à la limite de pouvoir l'enlever à la main (et donc que j'enlève à la main).

Une fois le cadre monté avec ses quatre tasseaux et vérifié qu'il rentre dans le bâti, je marque d'une petite flèche l'arête intérieure arrière de chaque montant. Je démonte tout, et effectue la rainure qui va accueillir le panneau central. J'ai effectué cette rainure avec une fraiseuse portative (voir les conseils importants pour son utilisation  au chapitre Outillage). Dans cette rainure s'insère un panneau de contreplaqué mélaminé de 8mm. La mélamine est légèrement poncée pour enlever le brillant. Ces panneaux ont eu l'énorme avantage d'être trouvé dans une solderie...

Des chevilles sont insérées dans les lamages pour boucher les trous visibles.

Bon voilà une porte terminée. Les explication sont longues, mais quand récapitule les opérations, y'a pas grand chose à faire. Pourtant, j'ai mis environ 4 heures par portes...

La structure et l'aménagement

Je ne parle que maintenant de la structure du meuble, puisqu'il était plus logique de parler des portes en premier, mais il est bien évident que cette structure à été réalisée en premier, puisqu'elle conditionne la dimension de chaque porte.
Il s'agit de bêtes tasseaux de la même épaisseur que ceux qui ont permis de réaliser les portes. Seul impératif : que chaque porte possède au moins un vrai angle droit, sinon c'est très difficile de prendre les mesures de la porte et surtout de son panneau intérieur. Le tasseau du bas est bien plus large que tous les autres, car il doit rattraper une différence de niveau de plancher de 5 cm entre le bord et le centre de la pièce...
De petits bouts de tasseau sont vissés derrière pour servir de supports aux aimants qui maintiennent les portes fermées.

Pour la pose des gonds: on fixe d'abord le mâle sur le montant, dispose la femelle dessus (sans arrière pensée cochonne, voyons!), puis on présente la porte, en intercalant une cale pour ménager le jeu du dessous. Un petit repère au crayon, et comme cela on a bien moins de chance d'avoir un bout de bite de gond visible...

L'aménagent de l'intérieur (cloisons et étagères) est fait avec le même contreplaqué mélaminé que les porte, mais en 12mm d'épaisseur pour les étagères. Les chants faces à l'ouverture, très moches lorsqu'il sont bruts, sont recouvert d'une baguette d'angle qui revient sur le dessus de l'étagère. La largeur quelque peu "king-size" de ces baguettes donnent l'impression d'un planche bien plus épaisse...

 

Reste la touche finale...

Les poignées de portes

J'avais déjà utilisé des galets dans la cuisine, il me fallait trouver autre chose, et l'idée des coquillage est venue. Ici il s'agit de pétoncles.

Elles ont l'inconvénient d'être assez fragile, il a donc fallu les doper.
Les couches:

Coquille
Résine
Colle
Résine
Coquille
Rondelle caoutchouc

Porte

Boulon poêlier + rondelle à ailettes+ rondelle+écrou
Après une bonne poilée avec de l'ail et du beurre et un nettoyage minutieux, j'ai à moitié rempli chaque face avec de la résine polyester.
L'entretoise qui ménage un espace avec la porte doit aussi épouser la forme de la coquille. J'ai détourné ici un butoir  de porte, sorte de grosse rondelle en caoutchouc possédant exactement la petite dépression au centre permettant l'encastrement du bombé du coquillage. De plus l'adhérence du caoutchouc permet d'éviter au bouton de tourner. Dorénavant, je mettrai toujours un petit bout de caoutchouc, parce que resserrer périodiquement les boutons de toute la maison me tape particulièrement sur les nerfs.
Le bouton est fixé avec un boulon poêlier (à large tête plate), et on empêche sa rotation avec une rondelle à ailettes. l'écrou est encastré pour être masqué. La pétoncle retrouve son chapeau grâce à deux points de colle à chaud (rapide, supporte les fortes épaisseurs sans retrait).

 

 

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